La journée scientifique 2024 de l'AFPSSU
s'est déroulée à l'Académie de médecine - Paris le 22/11/2024.
SANTÉ MENTALE DES ENFANTS ET DES JEUNES.
Quelles ressources dans les environnements scolaire, social, sanitaire ?
Synthèse par notre grand témoin - Le Dr Christine Lequette : La santé mentale mise à l’honneur à l’Académie de Médecine le 22 novembre 2024 lors du colloque de l’AFPSSU
Le thème de ce colloque a été choisi de longue date (octobre 2023) et se veut précurseur et introductif de l’année 2025 qui a défini comme priorité nationale la santé mentale.
Il a réuni des orateurs de grande qualité avec un beau programme alternant des interventions de chercheurs et des expériences de terrain qui nous ont tenu en haleine toute la journée.
Les équipes qui ont présenté des projets de terrain remarquables doivent faire connaitre leurs travaux et les partager partout en France. Ces actions qui sont menées dans toutes les régions de France devraient connaitre plus de diffusion, afin d’augmenter les ressources à la disposition des équipes éducatives et de santé.
En effet il nous faut des ressources (I. Gillaizeau) car nous constatons une forte dégradation des indicateurs positifs de santé mentale entre 2018 et 2022. Comment aider ces 13% d’enfants qui ont au moins 1 trouble (TDAH, opposition, émotionnel : Santé Publique France enquête ENABEE), et les 700 000 enfants harcelés, tout comme les enfants qui se disent victimes d’une agression ou d’une méchanceté en ligne. Le Pr Didier Acier qui a présenté le numérique et son incidence sur la santé mentale nous interpelle notamment dans les problématiques de harcèlement numérique et évalue à 40% la proportion d’enfant victime d’agression ou de méchanceté en ligne.
Le doublement des tentatives de suicide des jeunes interpelle les politiques et nous interroge. Ces indicateurs de mal-être et de souffrance psychique et leurs conséquences notamment sur les apprentissages ne peuvent dédouaner l’école de s’en préoccuper et de trouver des solutions pour agir en faveur d’une amélioration de la santé mentale des élèves. Des équipes de recherche s’y attellent, ces chercheurs nous stimulent et nous accompagnent en validant des programmes (Programme TEAL…) La formation des enseignants par les personnels de santé et du social et par les psychologues de l’éducation nationale largement investis dans les formations en lien avec la santé mentale n’est pas suffisante, il nous faudra élargir la base des personnels qui pourront intervenir en santé mentale en formant les enseignants comme par exemple pour les formations « phare » pour la lutte contre le harcèlement.
Le Pr Shankland nous incite à travailler en systémique et pas uniquement sur les harceleurs, en travaillant sur les systèmes scolaires c’est le plus efficace mais plus difficilement mesurable. Dans les évaluations d’établissement le climat scolaire est mesuré, ce qui est un vrai progrès. Comment mettre en œuvre des mesures systémiques : il s’agit de promouvoir le sentiment d’appartenance, (par exemple en multipliant les séjours d’intégration, en développant le lien social, l’entraide, la solidarité) en englobant les parents sur certaines thématiques. Ces actions systémiques ont montré des effets positifs sur la santé mentale des jeunes, en diminuant les problèmes de comportement et de violence, et en améliorant les apprentissages, et l’estime de soi. Dans l’appel à projet un des lauréats a développé une action dans ce sens : le lycée professionnel de Parthenay avec son projet « Les Grippeaux sur un GR » a développé le vivre ensemble en déconnexion numérique. De même la diffusion d’une mallette pédagogique développée par le rectorat de Grenoble pour aborder la question LGBT+ en lycée permet d’outiller les enseignants ou les personnels des équipes éducatives élargies et ainsi de lutter contre le harcèlement. Mais qui prend soin de ceux qui prennent soin ? La communication non violente qui a été présentée est une notion scientifique à ne pas banaliser : il s'agit de techniques qu’il faut maitriser et qui ne sont efficaces que si elles sont enseignées par des professionnels formés. Ces formations permettent entre autres de développer la bienveillance envers soi-même, ce qui permet aux enseignants d’être moins rudes avec eux même et de prendre conscience de ce qu’ils font. Il est nécessaire de se protéger et de protéger les autres du stress qui est toxique pour le cerveau notamment celui en devenir des jeunes en encourageant l’empathie, la bienveillance, la coopération et l’apaisement. Le projet Psycom - le jardin du dedans, vise à sensibiliser les enfants sur la santé mentale et à lever les tabous sur le sujet. Dans le même temps, il propose d'aider les adultes à aborder le sujet avec les enfants. Le projet du lycée professionnel Eiffel de Reims « Révisons ensemble au lac » est un projet de lutte contre le décrochage scolaire qui renforce les besoins fondamentaux d’accomplissement de soi, d’autonomie, et du sentiment d’appartenance à travers l’activité sportive paddle. Renforcer les CPS, ce n’est pas seulement apprendre le vocabulaire des émotions mais aussi apprendre à les repérer les vivre et les maitriser ce qui est plus complexe.
L’académie de Reims a développé des espaces d’aide à la réussite en lycée, a formé tous les adultes au repérage des signes de mal être dans les lycées expérimentaux, 8 établissements participent l’évaluation est en cours.
L’action de terrain marseillaise : « l’odyssée des émotions » mérite d’être publiée et diffusée largement car elle a donné lieu au développement d’outils didactiques pour animer 20 séances à raison d’une séance par semaine dans toutes les classes d’une école primaire de REP .
Il faut diffuser ce type de travaux pour étendre leurs effets probants sur le climat scolaire. Mais c’est bien là le problème, notre ministère valorise peu les publications, les expérimentations et les participations aux recherches pourtant pourvoyeuses d’outils de qualité.
Par ailleurs il a été montré l’intérêt de développer les partenariats avec les communes comme nous l’avons vu avec la présentation du projet des écoles de la ville de Cassis où un collectif multi partenarial pour gérer le temps de l’enfant est créé. Certains enfants passent 10h par jour en collectivité (5h à l’école, 5h en collectif avec la commune (cantine, périscolaire), les enfants ont demandé plus de liberté sur l’heure du repas, ils pratiquent des ateliers qu’ils choisissent. Les intervenants ont appris à se connaitre, à lutter contre les préjugés (éducation nationale versus collectivités territoriales). Un des effets notables a été que les agents communaux recrutés sont plus stables, il y a moins de turn over des équipes qui mettent plus de sens à leur travail. Les enfants présentent moins de problème de comportement, apprécient l’autonomie de choix qui leur est laissée, et se sentent plus en sécurité.
Enfin l’association IMHOTEP développe des outils à la disposition des étudiants notamment en expérimentation à Reims, pour lutter contre l’isolement des étudiants et faire connaitre les ressources à disposition pour ces étudiants qui arrivent dans une ville universitaire inconnue.
Tous ces projets mériteraient d’être présentés au conseil supérieur de l’éducation nationale qui peut aider à valider les projets et les diffuser.
L’utilisation de ressources validées est donc impérative. « Santé publique France » se propose de recenser les outils probants et validés par la recherche. Les programmes permettant de travailler les compétences psychosociales, de les faire progresser sont tout à fait indiqués pour améliorer la santé mentale des jeunes. Faire la promotion des facteurs protecteurs pour une bonne santé mentale tels que l’activité physique, le sommeil de qualité, le soutien social, la gratitude, les loisirs est efficace.
Cette très riche journée a présenté des actions de terrain qui mobilisent un peu partout des collectifs de professionnels au service des élèves et des étudiants pour faire progresser positivement la santé mentale de nos jeunes, merci encore aux organisateurs pour la qualité de leurs interventions. Nous nous engageons à en diffuser largement les contenus pour inspirer un maximum de publics.
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